L’équipement de base

Comme la plupart des activités, la spéléologie nécessite un équipement spécifique. Celui-ci a considérablement évolué depuis les explorations réalisées par E.A. Martel, considéré comme le père de la spéléologie moderne, au début du 20ème siècle.

Descente à l'escarpolette
Equipement et technique de descente des verticales à l’époque de Martel

On peut définir 2 types d’équipement :

l’équipement individuel, propre au spéléologue, qui va lui permettre de se protéger, de s’éclairer et de progresser dans les différentes configurations de cavités, horizontales ou verticales.

L’équipement collectif, et notamment le matériel nécessaire pour descendre et remonter les verticales que l’on peut rencontrer sous terre.

L’équipement individuel

Casque et éclairage

Elément n° 1 de l’équipement du spéléologue, sans lequel aucune incursion dans le monde souterrain ne serait possible : l’éclairage. En effet, sous terre, c’est le noir absolu, et il n’y a pas la moindre lueur qui permettrait d’apercevoir quoi que ce soit.

Le premier moyen d’éclairage utilisé par Martel a été la bougie, tenue à la main, ou fixée sur son chapeau par un bandeau. Inutile de préciser qu’on n’y voyait pas grand chose, surtout dans des salles souterraines grandes comme des cathédrales. Imaginez-vous un instant, à califourchon sur un morceau de bois suspendu à une corde dans un gouffre inconnu énorme , avec juste le halo d’une bougie comme éclairage. Ça fait froid dans le dos…

Par la suite, immense progrès, est apparue la lampe à acétylène, empruntée aux mineurs. L’éclairage chaleureux créait une “bulle lumineuse” de plusieurs mètres de diamètre. Le générateur produisait de l’acétylène à partir d’une réaction chimique de l’eau sur une “pierre” de carbure de calcium.

Production d’acétylène

Elément de protection indispensable associé à l’éclairage :  le casque. Il est bien évidemment destiné à protéger la tête du spéléologue des chutes de pierres dans les puits. Il va également bien servir dans les passages bas où il n’est pas rare de se cogner contre la roche.

L’éclairage étant fixé sur le casque, les mains sont donc libres pour faire autre chose. En plus, l’endroit où l’on regarde est automatiquement éclairé puisque l’éclairage suit le mouvement de la tête.

Aujourd’hui, écologie oblige, l’acétylène n’est plus utilisée, et l’éclairage se fait par des LEDs nouvelle génération, alimentées par des accus électriques.

Eclairage mixte acétylène / électrique
Eclairage mixte acétylène / électrique
En noir, le générateur d’acétylène. Le gaz sous pression était amené par un tuyau vers un bec (brûleur) qui dégageait une flamme éclairante. Un allumage piezoélectrique complétait généralement le système, ainsi qu’une lampe électrique de secours permettant également d’éclairer au loin. Lors de la remontée de puits arrosés (cascades), la flamme de pouvait pas tenir, et seul l’électrique était opérationnel.
nouvel éclairage LED
nouvel éclairage LED
Les LEDs nouvelle génération offrent une éclairage électrique ultra performant pouvant engendrer un flux lumineux de 1500 lumens (un phare de voiture halogène délivre 1600 lumens). On regrette cependant la chaleur de la flamme qui était bien appréciable pour créer un point chaud sous une couverture de survie, en cas de longue attente.
Les vêtements
la combinaison

La protection du corps est assurée par une combinaison complète, en une seule pièce. En effet, les équipements en plusieurs parties (pull et pantalon) peuvent présenter un danger dans les passages étroits horizontaux ou verticaux. Un pull étant susceptible de “remonter” et de faire “bouchon” lors de la descente d’une étroiture verticale, ou lors d’une marche arrière forcée, dans un boyau horizontal.

Le choix du matériau utilisé pour la combinaison est également délicat. Une chose est certaine : le matériau doit être très résistant à l’abrasion. La combinaison est extrêmement sollicitée lors des passages rampés, les progressions en opposition entre deux parois rapprochées, les étroitures de tous types,…

La nature du matériau utilisé va dépendre du type de cavité, sachant qu’il n’existe pas de matériau “idéal”, seulement un meilleur compromis.

Les combinaisons en PVC, lisses et plus imperméables, seront préférées pour l’exploration de cavités arrosées présentant des cascades ou un fort ruissellement d’eau. Dans ce cas, la protection contre l’eau, généralement froide sous nos latitudes, voire très froide selon l’altitude, sera plus efficace pendant un certain temps, plus au moins long selon l’intensité de l’arrosage…

Pour la visite de cavités plus “sèches”, on optera plus pour une combinaison en matériau tissé laissant plus facilement passer la transpiration. Le milieu souterrain est saturé d’humidité (plus de 90% et plus souvent proche de 99%). Lors d’efforts intenses (passages d’étroitures, remontées de puits,…), l’évaporation de la sueur est freinée par le fort taux d’humidité, ce qui empêche le refroidissement indispensable du corps et donc, augmente la transpiration… Une combinaison entièrement imperméable va empêcher encore plus l’évaporation de la transpiration…. On augmente donc l’essoufflement, le rythme cardiaque, la fatigue, etc…

Dans les années 1980 à 2000, la préférence allait vers les combinaisons en PVC de couleur orange, ou jaune canari… cuicui…

 

Combinaison en cordura

Aujourd’hui, il semblerait que les spéléos préfèrent les combinaisons en fil tissé résistant (cordura ou autre) avec un léger film protecteur qui ne freine pas trop l’évaporation. La protection contre l’eau, par contre, est quasi inexistante.

Comme je le soulignais auparavant, il s’agit de trouver le meilleur compromis (ou le moins pire, dans certains cas).

Sous-combinaison

Autre élément qui va jouer un rôle d’importance dans la régulation de la température corporelle : la sous-combinaison.

Là encore, tout va dépendre du “profil” de l’exploration. Sous-combi légère de type Rhovyl, ou micro-polaire pour les progressions rapides en petite équipe, ou plus “lourde”, en fibre polaire, si des longues périodes d’attente sont à craindre (équipe nombreuse, visite à thème comme la photo ou la topographie, présence de débutants,….) ou dans des cavités particulièrement froides (massifs d’altitude).

sous-combinaison en rhovyl
Autres éléments de protection

Pour les mains, certains préfèrent ne rien utiliser, mais beaucoup optent pour l’utilisation de gants protecteurs, généralement en caoutchouc pour isoler de l’eau et de la boue…. Dans certains situations, l’utilisation de gants peut être gênante, notamment pour l’escalade, la mise en place des équipements de progression sur corde. Personnellement, je prends toujours des gants, mais je ne les utilise pas tout le temps, et dans ce cas, je les glisse à l’intérieur de la combinaison.

Restent les pieds.

2 écoles se livrent une guerre sans merci (mais dans le monde spéléo, chaque matériel ou technique est source de conflit, plus ou moins sévère, selon le nombre de bières déjà englouties et restant à engloutir) : Bottes ou chaussures !

Les bottes en caoutchouc ont longtemps prédominé. Elles offrent de nombreux avantages et principalement : prix peu élevé, résistance importante, facilité d’entretien, et surtout elles permettent de garder les pieds au sec dans les cavités ou l’on ne rencontre que de petites flaques d’eau ou de boue, ainsi que dans les petits ruisseaux souterrains peu profonds. Par contre, dans les rivières plus importantes, ou les cavités bien arrosées, elles ne sont plus un avantage, bien au contraire, car elles se remplissent d’eau et deviennent ainsi de vrais boulets…

Les chaussures présentent, bien entendu, l’inconvénient de ne pas protéger lors du passage de flaques d’eau, elles sont souvent onéreuses et moins résistantes qu’une bonne paire de bottes. En contrepartie, elles tiennent mieux aux pieds et renforcent donc la stabilité lors de passages en escalade, ou en opposition. Dans les rivières, elles sont plus légères et ne se remplissent pas trop d’eau si on utilise des modèles destinés au canyoning. Aujourd’hui, j’ai une préférence marquée pour les chaussures, mais j’ai toujours une paire de bottes sous le coude, si je puis dire, pour certaines cavités.

Bottes ou chaussures ?

Voici terminé ce tour d’horizon du matériel individuel standard de protection, utilisé en spéléologie. Il existe également d’autres équipement spécifiques, comme les combinaisons en néoprène de plongée ou de canyoning, les pontonnières, cagoules, utilisées dans les rivières souterraines ou sous les fortes cascades….

D’autres petits “utilitaires” font partie de l’équipement du spéléo et c’est dans ce petit équipement que s’expriment aujourd’hui la “particularité” du spéléo (qui comme chacun le suppute est un être bizarre pour aller s’enfermer sous la terre, dans le froid le noir et où il n’y a rien à gagner, pas de trésor, pas de médaille, et même pas un classement de meilleur spéléo du département, du pays ou du Monde…), car le matériel s’est fortement “industrialisé”, et il n’y a plus trop de place laissé au bricolage comme c’était le cas, il y a… longtemps… L’aspect “extérieur” du spéléo s’uniformise et c’est dans les détails qu’il va exprimer son originalité : équipement de survie, bandana, foulard, genouillères, cagoule, chouchou, grigri africain, couteau, outils… la liste est longue…

 

Couverture de survie
Genouillères
Le matériel de progression sur corde
. Les cordes

La descente et la remontée des passages verticaux, appelés puits ou ressauts, s’effectuent à l’aide de cordes fabriquées en fibres synthétiques. Elles ont, en général, un diamètre entre 8 et 10 mm, et leur résistance théorique en traction est au minimum de 1800 daN (1,8 tonne pour simplifier).  Cela peut paraître largement dimensionné, mais il faut savoir que la Force-choc, en cas de rupture d’un point d’attache, par exemple, peut atteindre 1000 daN…

Les cordes utilisées en spéléologie sont différentes des cordes de montagne au niveau de leur élasticité. Une corde de montagne, ou corde dynamique, va avoir un taux d’élasticité de 8 à 10 % sous une charge de 80 kg, alors qu’une corde de spéléologie, statique ou semi-statique, aura une élasticité entre 3 et 5 %. Cette différence s’explique par le fait que la corde d’escalade est destinée à stopper une chute. Elle doit donc être plus élastique pour mieux absorber le choc dû à la chute du grimpeur. En spéléo, la corde sert à progresser, et si elle était aussi élastique on aurait rapidement le “mal de mer” à cause de l’effet “yoyo”.

Pour pouvoir se servir des cordes, le spéléologue aura besoin de matériels spécifiques, pour monter et pour descendre le long de la corde.

. Le harnais

Tout d’abord, le spéléologue “enfile” un harnais (ou baudrier) sur lequel on va attacher le matériel de progression. Le harnais est constitué de sangles larges : 1 ceinture, et au minimum 2 boucles entourant les cuisses et servant à “porter” la personne en position à peu  près assise. Les différentes sangles sont reliées à un maillon central en métal sur lequel vont être fixés les équipements. dans ce maillon sont accrochées 2 longes, en corde ou en sangle, qui vont servir notamment à pouvoir s’approcher du départ du puits en toute sécurité.

. Pour la descente

Pour descendre les puits, on va utiliser un appareil appelé… descendeur… Il est constitué de 2 poulies fixes autour desquelles la corde va faire un S qui va freiner la corde pour pouvoir contrôler la vitesse de descente d’une seule main.

. Pour remonter

Pour la remontée, on utilise 2 ….bloqueurs (mais on aurait bien pu les appeler remonteurs). Ces appareils ont la particularité de coulisser sur la corde dans le sens de la montée et de bloquer dans le sens de la descente. Un bloqueur se fixe sur le maillon central du harnais. Il se nomme généralement le “Croll” (c’est le nom d’une marque) et possède une forme particulière qui le place dans une position bien adaptée pour la remontée. Sur l’autre bloqueur (appelé également “poignée”) on fixe une cordelette qui va servir de pédale. La remontée s’effectue très simplement en se hissant sur la pédale, puis en se laissant reposer sur le Croll qui a monté quelques dizaines de centimètres puisqu’il est solidaire du corps. On remonte ensuite la poignée pour se hisser à nouveau dessus… et ainsi de suite, jusqu’en haut du puits.